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       Lycée Joliot Curie 92000 Nanterre EAF 2016 1ST2S2 (français) Séquence nº 2: le personnage de roman et son mentor Documents complémentaires Raymond Queneau, Zazie dans le métro, 1959 
 "Vous m'avez encore l'air d'être un drôle d'éducateur, vous." (Zazie est une petite fille provinciale très curieuse qui vient à
      Paris pour découvrir le métro. Son oncle Gabriel essaie de faire son éducation.) – T'en
      as dla suite dans les idées pour une mouflette, observa Gabriel
      languissamment. – Réponds
      donc, et elle lui foutit un bon coup de pied sur la cheville. Gabriel
      se mit à sauter à cloche-pied en faisant des simagrées. – Houille,
      qu'il disait, houïe là là aouïe. – Réponds,
      dit Zazie. Une
      bourgeoise qui maraudait dans le coin s'approcha de l'enfant pour lui dire
      ces mots: – Mais,
      voyons, ma petite chérie, tu lui fais du mal à ce pauvre meussieu. Il ne
      faut pas brutaliser comme ça les grandes personnes. – Grandes
      personnes mon cul, répliqua Zazie. Il veut pas répondre à mes
      questions. – Ce
      n'est pas une raison valable. La violence, ma petite chérie, doit
      toujours être évitée dans les rapports humains. Elle est éminemment
      condamnable. – Condamnable
      mon cul, répliqua Zazie, je ne vous demande pas l'heure qu'il est. – Seize
      heures quinze, dit la bourgeoise. – Vous
      n'allez pas laisser cette petite tranquille, dit Gabriel qui s'était
      assis sur un banc. – Vous
      m'avez encore l'air d'être un drôle d'éducateur, vous, dit la dame. – Éducateur
      mon cul, tel fut le commentaire de Zazie. – La
      preuve, vous n'avez qu'à l'écouter parler (geste), elle est d'une grossièreté,
      dit la dame en manifestant tous les signes d'un vif dégoût. – Occupez-vous
      de vos fesses à la fin, dit Gabriel. Moi j'ai mes idées sur l'éducation. – Lesquelles?
      demanda la dame en posant les siennes sur le banc à côté de Gabriel. – D'abord,
      primo, la compréhension. Zazie
      s'assit de l'autre côté de Gabriel et le pinça rien qu'un petit peu. – Et
      ma question à moi? demanda-t-elle mignardement. On y répond pas? – Je
      peux tout de même pas la jeter dans la Seine, murmura Gabriel en se
      frottant la cuisse. – Soyez
      compréhensif, dit la bourgeoise avec son plus charmant sourire. Zazie
      se pencha pour lui dire: – Vous
      avez fini de lui faire du plat à mon tonton? Vous savez qu'il est marié. – Mademoiselle,
      vos insinuations ne sont pas de celles que l'on subtruque à une dame dans
      l'état de veuvage. – Si
      je pouvais me tirer, murmura Gabriel. – Tu
      répondras avant, dit Zazie. Gabriel
      regardait le bleu du ciel en mimant le désintérêt le plus total. – Il
      n'a pas l'air de vouloir, remarqua la dame veuve objectivement. – Faudra bien. 
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     Raymond Queneau (1903-1976) XXe siècle (20e s.) 
 Intérêt pour l'enquête 
 
 En 1959,
      en pleine Nouvelle vague du cinéma français et aux débuts de la société
      de consommation, on assiste à une espèce de prise de pouvoir des
      adolescents, à une remise en cause des modèles éducatifs traditionnels.
      Ainsi chez Queneau Zazie fait irruption dans la littérature de manière
      non conventionnelle, comme un disciple rebelle qui enfreint toutes les
      règles. La « mouflette » en arrive finalement à
      supplanter le mentor qu’est l’oncle Gabriel. Il y a donc retournement
      complet de l’image du mentor et de sa relation avec l’élève.  
 
 
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